L'enfant sans nom
J'ai récupéré ce titre du nom du site d'une association "l'enfant sans nom" qui milite pour qu'enfin les enfants nés sans vie soient reconnus par l'état civil.
En effet, un enfant mort-né ou né et estimé nom viable aura un acte d'enfant né sans vie, alors qu'un enfant qui nait vivant et qui meurt peu après a un acte de naissance et un acte de décès, et par conséquent, il figure à l'état civil.
Mon fils est mort environ 30 ou 45min avant sa naissance, par conséquent sur notre livret de famille, dans la case "premier enfant", en bas de page il a été rayé la mention "acte de décès" et réécrit par "acte d'enfant né sans vie", et il s'appelle Erwann... Juste Erwann. Officiellement il n'a pas de nom de famille. Cruelle manière de dire qu'officiellement il a existé, mais à moitié.
De même que si une femme perd son bébé avant 22SA, elle est considérée comme en congé maladie et a droit à deux semaines, et pas le congé maternité. Quand au papa, le congé paternité il peut toujours en rêver.
Ayant accouché bien après ces 22SA, j'ai eu mon congé maternité, mon mari a eu son congé paternité. Mais 11 jours c'est quoi lorsque l'on vit une telle chose ? peanuts !!! Mon mari n'aurait pas pu se débrouiller pour travailler à la maison pendant les deux mois après la mort de mon fils, ça aurait été très très dur pour moi, et peut être pour lui ! Mais tout le monde n'a pas cette chance, et je n'ose pas imaginer mon état si j'avais dû me retrouver seule seulement 11 jours après la mort de mon fils. J'estime que lorsque l'on perd un enfant de cette manière, le père devrait pouvoir bénéficier d'au moins un mois grand minimum pour être avec sa femme. La douleur est tellement grande que se retrouver seule, c'est très difficile. Et pour le père, même s'il vit les choses différemment, devoir retravailler 11 jours après avoir perdu son enfant, c'est très cruel aussi !
Il n'y a pas si longtemps, lorsqu'un bébé naissait mort, les médecins l'enlevaient vite de la vue de la jeune maman, soit disant pour ne pas lui faire plus de mal. Alors que finalement l'effet était inverse, vu qu'elle ne voyait pas ce bébé tant attendu. Heureusement aujourd'hui, même des bébés nés très tôt dans la grossesse peuvent être pris par leurs parents, choyés, et ils peuvent lui dire aurevoir et par là même pouvoir entamer leur travail de deuil.
L'état a peur qu'en donnant une reconnaissance officielle à ces 5000 bébés morts-nés (quand même ça fait près d'1% des naissances !!), il remette par là même en cause le droit à l'avortement. Alors que la reconnaissance est surtout symbolique en fait. Nous avons tellement besoin de parler de notre enfant, dire qu'il a existé, qu'il a bien été là, et qu'il sera pour toujours dans notre vie tellement sa vie, aussi courte ait-elle été, et sa mort auront chamboulé la notre de vie !! Et qu'officiellement il n'ait pas vraiment d'existence, qu'il ne soit qu'une case raturée et réécrite dans notre livret de famille, c'est dommage.
Cette manière de faire montre bien que finalement, ces 5000 bébés morts-nés chaque année sont du domaine du tabou. On n'en parle pas.
On nous bassine avec les accidentés de la route, on entend parler des drogues, de l'alcoolisme, de tout ça... Mais de ces 5000 bébés morts-nés et de leurs parents qui non seulement souffrent de cette perte, mais qui ont le sentiment que ce qu'ils vivent dérange, personne n'en parle. D'ailleurs quand Erwann est mort, je ne réalisais pas du tout que ça arrivait tant. Ben oui, on vit au 21e siècle !! Les bébés ça ne meurent plus ! On arrive bien à les récupérer à 5 mois 1/2 de grossesse parfois ! On fait accoucher des femmes de 70 ans !! Donc les bébés ça ne meure plus voyons. Et il ne faut pas en parler pour ne pas trop faire peur ...
Question :
-comment appelle-t'on quelqu'un qui a perdu ses parents ? un orphelin.
-comment appelle t'on quelqu'un qui a perdu son conjoint ? un veuf.
-comment appelle-t'on quelqu'un qui a perdu son enfant ? Même la langue française est sans mot devant la mort d'un enfant... (et finalement je réalise qu'il n'y a pas de mot pour définir quelqu'un qui a perdu un frère ou une soeur... comme quoi...)
à +
Tinote
(qui va bien contrairement aux apparences, je viens juste de voir un reportage de la chaine parlementaire sur le sujet :) )